2021-06-30 GR5-Via Alpina-Mercantour Intro J0

Entre GR5 et GR52, la balade en Via Alpina

30 juin 2021

Intro - Départ de Wizernes

 Précédemment

Qui n’a pas pensé un jour : « Je ferais bien ceci ou cela » et qui repousse pour moult raisons ! Remettre au lendemain, à l’année suivante, lorsque la retraite aura sonné ! Un jour peut-être ! Qui sait ! A moins que tout ceci ne se transforme en regrets.

Avoir envie et aussi avoir l’appréhension de ne pas être à la hauteur de son défi, par manque d’assurance ou je ne sais quoi ! Et bien, moi, je ne suis pas différent d’un autre mais, lorsque j’ai cessé de travailler, j’ai sauté le pas car, après la retraite, il n’y a plus rien, il n’y a plus d’alternative, c’est donc le moment d’essayer de transformer mes rêves en réalité. Certains disent que ce n’est pas raisonnable, voire impossible, d’autres le pensent mais ne le disent pas. Mais aujourd’hui je suis très heureux de ce voyage au travers des Alpes, tout comme celui réalisé il y a 5 ans déjà ! Et vous, avez-vous des rêves, des projets ?

Aujourd’hui, j’ai passé une demi-dizaine supplémentaire et quelle belle excuse pour engendrer un nouveau projet. Cette fois, je pars uniquement dans les Alpes, de St Gingolph à Monaco. Mais je pars un peu plus léger, mon sac fait 16 kg (avec 2 litres d’eau) contre 21 à 24 kg ponctuellement, il y a 5 ans.

Cette fois, je garde la tente, au cas où ! Cela me permet d’avoir une plus grande autonomie, d’être plus souple sur le rythme en fonction de la météo, mais aussi de ma condition physique, c’est aussi un plus pour ma sécurité. Il me faudra savoir moduler mon allure en fonction des éléments extérieurs (météo, difficultés, rencontres et autres), le but premier étant le plaisir d’être en montagne. Cela étant, je profiterai aussi des refuges pour leur confort. Côté alimentation, je l’achèterai, au fil de mes déambulations, mais, là aussi, les refuges seront là, pour les bons repas mais aussi pour, les échanges et la convivialité.

La date du départ a été arrêtée il y a seulement 1 semaine lorsque j’ai appris que le Col de Susanfe à 2 426 m « serait » en théorie praticable avec des crampons. Bien que la trace du parcours soit figée, il reste une petite incertitude : la traversée du Mercantour au retour d’Italie, la tempête Alex qui a sévi en octobre a fait des dégâts considérables pour la population mais aussi sur les sentiers, certains ont même totalement disparu ! Heureusement, Jérémie est là et, grâce à lui j’ai eu des infos précieuses. De nombreux sentiers sont très abîmés mais en voie de reconstruction, je devrais probablement trouver un itinéraire bis et là encore Jérémie m’aidera au moment opportun, il sera mon routeur du Mercantour. Il y a 5 ans, je n’avais pas prévu que je croiserai le Tour de France ! Résultat en arrivant à Samoëns la veille du Tour, plus de couchage possible ! Malgré l’aide de Guillaume, j’ai dû continuer mon étape jusqu’au Refuge de la Golèse, 9 km et 1 000 m D+ plus loin ! Cette fois, j’essaye d’éviter ce type d’erreur, cependant aujourd’hui, il reste quelques incertitudes côté italien où j’ai peu, voire pas d’info ! A suivre donc…

Il y a une vingtaine d’années, je ne pensais jamais pouvoir vivre cela, il y avait de l’envie, mais cela me semblait bien trop inaccessible pour moi. Les rencontres avec Jean le Belge, Custo, Jean-Christophe, Yves et bien d’autres m’y ont aidé. En ce qui concerne la condition physique, je dois reconnaître que les amis du LNA (Longuenesse Nature Aventure) y ont beaucoup contribuée avec les entraînements de Jackie pour les trails.

Au fil des années, cela s’est insinué doucement dans mon ADN et j’y suis allé progressivement en faisant des randonnées itinérantes GR20 (Corse), GR58 (Queyras), GR54 (Ecrins), TPMB (Mt Blanc), GR5-GTA (Grande Traversée des Alpes), dont de nombreuses avec Christine.

Il y a 5 ans, le projet était de relier le sud de la Corse au Lac Léman successivement par le GR20 et le GR5. Je suis parti avec Philou, un copain rencontré lors du Marathon des Sables 2010. Malheureusement pour lui, il a dû jeter l’éponge un peu au-dessus de Nice et je me suis retrouvé seul pour le GR5. Cette expérience « forcée » d’être seul m’a permis d’appréhender et d’apprécier ce vagabondage. C’est pourquoi aujourd’hui je pars dans cet esprit là en essayant de toujours repousser mes limites physiques et psychologiques que je pensais insurmontables, mais en restant dans le plaisir.

Depuis que la date de départ a été fixée, je suis partagé entre excitation, stress et inquiétude, le même ressenti qu’avant le départ d’un ultra trail. Pour Christine, c’est la même chose mais sans l’excitation ! Pourtant, sans son appui incontestable, rien ne serait réalisable, je lui dois beaucoup dans tout ce que je fais.

Comme tout à chacun l’excitation me paraît normale devant un projet de cette envergure. Le stress vient en préparant le sac à dos, il faut qu’il soit complet et pas trop lourd, ne rien oublier, essayer de penser à tout ! Pas de révolution dans cette préparation, j’ai un peu d’expérience qui me permet d’optimiser mon sac. Néanmoins, le poids du sac augmente vite ! Je prends 5 repas (Corn flake avec lait en poudre) sans nécessité de réchaud, des contenants pour 3 litres d’eau, des crampons (pour la première semaine et qu’il me faudra porter les 3 semaines suivantes !), du gel hydro alcoolique et des masques (obligatoires en refuge), sans oublier le nécessaire pour mon compte rendu. Cela est complété par une mascotte (un petit ours) qui représente mes très proches ainsi qu’un dessin de Charline et de Raphaël.

L’inquiétude est apparue en partie, une semaine avant le départ après avoir pris connaissance de l’IRM de mon genou gauche, en voici un extrait que je pense interpréter : « Large rupture du segment moyen et de la corne postérieure du ménisque interne avec fragment libre, et réaction liquidienne dans les récessus sous-quadricipital ». Après plus d’un an de « liberté contrainte », j’ai souhaité continuer mon projet sachant que je suis dans une tranche d’âge qui ne me permet pas de remettre un tel voyage. J’espère que mon genou ne me posera pas de problème majeur avant la fin de l’été mais cela reste une inquiétude, une épée de Damoclès !

Clairement, l’envie est là, elle est très forte. Seulement, je ne suis pas seul, il y a moi et une bulle en forme de plomb qui paraît-il veille sur moi !!! Elle s’apitoie sur mon genou !!! Sera-t-elle bienveillante ? Quant à moi, je suis totalement dans le déni, toujours partant, motivé, excité à enjamber les cols, en demande de sensations fortes ! La bulle, quant à elle, pèse lourd, elle me freine voire m’empêche de passer le cap psychologique !!! Qui a donc raison, elle ou moi ? Mais moi, je n’ai plus le temps d’attendre, la vie file vite, très vite, trop vite….

A partir de demain, il va falloir que je me botte les fesses pour sortir de ma zone de confort ! Reprendre le rythme, me lever aux aurores pour marcher. Il me faudra quelques jours pour renouer avec ce tempo : marcher, manger, dormir, manger et repartir pour une nouvelle journée pour des moments si singuliers à vivre mais si intenses.Des moments parfois difficiles certes, mais aussi des moments de joie et d’échange avec d’autres randonneurs. Au programme, 2 jours sur le GR5, 24 sur la Via Alpina (rouge) et, 2 sur le GR52 dans le Mercantour pour terminer. Je vais connaître la solitude en montagne mais saurais-je l’appréhender, la vivre ? Une nouvelle expérience, un nouvel enrichissement, sans aucun doute !

Fini de faire le Kéké en disant : « Je vais faire une grande traversée des Alpes par la Suisse et l’Italie », ça le fait bien ! Faire de l’esbroufe, c’est accessible à tous. Aujourd’hui, j’ai abandonné les baskets pour les chaussures de randonnée, chargé de mon sac de 16 kg, je suis face à mon projet, face à moi-même où la seule issue est devant à moi ! A moi d’être à la hauteur de mon projet !

Avant-hier, je suis allé sur les Coteaux avec mon sac à dos chargé, j’ai randonné 1 heure dans le jardin d’Alex (1h15 pour 5,4 km et 200 m D+), je ne me souvenais plus ce que c’était 16 kg, la liberté et la semi-autonomie ont un prix ! Et dire qu’il y a 19 ans, avec Custo nous avons fait le GR20 en autonomie totale, nos sacs pesaient alors jusque 25 kg, mais nous étions jeunes !!

Ce matin Christine et moi, nous nous sommes quittés sur le quai de la gare TGV, mais ce sera pour mieux nous retrouver à l’issue de cette randonnée. Maintenant, il m’emmène sur les bords du Lac Léman près de la frontière Franco-Suisse à St Gingolph.

Alors que je suis sur le point d’arriver à Lyon, je reçois un mail de la SNCF m’informant que ma correspondance pour Evian les Bains est annulée. Après consultation du site internet, il y en a un, 2 heures plus tard et je pourrais avoir la dernière correspondance en bus pour St Gingolph donc pas de souci !  Pour transformer ce contretemps de manière positive, j’en informe mon binôme d’escalade qui travaille sur Lyon et c’est lui qui m’accueille à la descente du train. Cela est une belle opportunité ! Avec la crise sanitaire, cela fait près d’un an que nous ne nous sommes pas vus ! Nous partons déjeuner ensemble et au final, ce contre temps fut le bienvenu !

Me voilà donc dans le TER pour Evian les Bains, je rêvasse. Le nom des gares desservies ne m’est pas totalement inconnu, je commence à apercevoir le Lac Léman, une véritable mer intérieure, il fait 70 km de long et, est traversé par le Rhône. J’arrive à Evian et je file prendre le dernier bus pour St Gingolph, pas question de le manquer. Je n’attends pas très longtemps et je suis seul à le prendre. Cela me permet de discuter avec le chauffeur. Je lui demande s’il connaît les prévisions météo et il m’informe que chaque soir, les orages se déchaînent sur le massif ! Rien de très bon ! De l’autre côté du lac, lorsqu’un voile de brouillard disparaît, j’aperçois Lausanne, nous traversons Thônon les Bains toujours en longeant cet immense lac. Il y a 5 ans, j’avais terminé par le sentier des Balcons du Léman. Il y avait bien du soleil, mais malheureusement, il y avait aussi beaucoup de nuages bas, les points de vue ont été rares.

En me rapprochant de St Gingolph, je demande au chauffeur s’il connaît le camping municipal. Et là, surpris, il me dit : « Ah je ne savais pas qu’il y en avait un ! ». Pas plus inquiet que cela, je poserai la question une fois arrivé !

Une fois descendu du bus, le sac sur le dos, je cherche le panneau salvateur du camping. Ne voyant rien, j’interpelle un rare passant et lui pose la question. A cela il me répond : « Il y a effectivement un projet mais rien pour l’instant ! Le plus proche se trouve en Suisse à 5 à 6 km ». J’ai donc dû le rêver et pour parfaire ce moment de solitude, le temps devient extrêmement menaçant, il fait sombre. L’appréhension et le questionnement qui se posent toujours avant le premier pas dans un projet de cette envergure n’ont plus leurs places. Il est 19h30, j’achète une bouteille d’eau et je quitte St Gingolph alors que la pluie commence à tomber, objectif, trouver quelques mètres carrés hors de la commune pour bivouaquer !

Je traverse la route, je suis dans le Chablais, tout de suite, ça grimpe et ça ne fait pas semblant ! La montée est régulière et continue. Pour l’instant seules quelques entrées d’habitations sont relativement plates pour planter la tente, mais c’est impensable ! Je quitte les dernières maisons et m’enfonce en sous bois. Cela a un côté positif car cela atténue quelque peu l’orage qui maintenant se déchaîne. Je vois bien quelques entrées ici ou là mais rien d’exceptionnel, d’ailleurs je ne m’imagine pas un instant déployer la tente dans ces conditions ! Je continue donc en suivant ce chemin tantôt forestier, tantôt single qui longe la Morge, le torrent qui officie comme frontière franco-suisse. Je passe à côté d’un petit cimetière avec de beaux petits emplacements non utilisés, mais j’imagine que cela serait mal perçu !!

Après une heure de marche à bonne allure, j’aperçois une grange avec cette fois un espace qui pourrait peut être me convenir. Je me donne ¼ d’heure supplémentaire et si dans ce laps de temps je ne vois rien de mieux, je redescends. Là, j’ai eu le feeling, j’arrive à Novel où un gîte hôtel (Les Chemins du Léman) est implanté. Je croise les doigts et me présente à l’accueil. Une fois franchi la porte, je reste sur le paillasson, je dégouline de partout ! Une dame me reçoit et accepte ma demande. En même temps, elle me fait passer par une autre porte pour ne pas inonder le restaurant. Content, je me plie sans restriction à sa demande. Elle m’emmène dans un dortoir spacieux de 8 couchages qui est bien rempli. 

Une bonne douche, des vêtements secs, les autres sont dans une salle chauffée pour l’occasion où je dépose aussi  mon sac à dos et mes chaussures. Un bon repas et une petite soirée avec des randonneurs belges, le must en somme ! Reste un petit « hic », mon chargeur (avec 3 sorties) pour ma montre, mon GPS et mon téléphone ne fonctionne plus. Pour l’instant, j’utilise ma batterie de secours mais il me faudra trouver une solution rapidement !

Avec une telle météo, il n’y a pas eu de photos de faites au bord du lac au point de départ.

Le calendrier prévisionnel de mes étapes, c'est ICI

C’était totalement imprévu mais en cette fin de journée, ma montre m’affiche 4,75 km et 519 m de dénivelé positif en 01h12, un bon rythme pour un départ inattendu. 

La vidéo de la journée, c’est ci-dessous (0'51'')

Demain, c’est le véritable départ, direction le Chalet de Bise.

La suite, c'est ICI